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De Robertis (Tommaso), Burzelli (Luca) [dir.]

Chrysostomus Javelli. Pagan Philosophy and Christian Thought in the Renaissance, Cham (Suisse), Springer, 2023, XIV-268 p. (« International archives of the history of ideas »/ « Archives internationales d’histoire des idées », 243). Notice de QSH. Contient : I, « Context » : Michael Tavuzzi, « Chrysostomus Javelli OP (c. 1470-1540). A Biographical Introduction », p. 3-28 [Le dominicain Crisostomo Javelli (v. 1470-1540) est surtout connu pour ses nombreux ouvrages de tradition philosophique et théologique thomiste, réunis dans les Opera omnia de Lyon en 1568 et 1580 et Venise en 1577. Son œuvre est ici réinscrite dans le contexte de sa vie de dominicain de l’observance, d’inquisiteur « sans enthousiasme », d’auteur prolixe et de professeur dévoué, tous aspects qu’éclairent de manière neuve des sources primaires non exploitées auparavant, en particulier le matériau prosopographique fourni par les premières éditions, pour beaucoup à présent très rares, de ses multiples écrits : lettres de dédicace, colophons et remarques autobiographiques faites en passant, largement négligés jusqu’ici] ; Annalisa Cappiello, « Javelli, Pomponazzi and the Immortality of the Soul : From the Solutiones (1519) to the Tractatus de animae humanae indeficientia (1536) », p. 29-50 [Lors de la controverse suscitée en 1516 par le Tr. de immortalitate animae de Pomponazzi, Javelli, régent du studium dominicain de Bologne, vint au secours de Pomponazzi dont le Defensorium avait été censuré par l’inquisition de Bologne pour sa non-conformation à la bulle Apostolici regiminis de 1513. Il écrivit en 1519 un appendice de Solutiones au Defensorium dans lequel il résolut à la lumière de la foi tous les arguments en faveur de la mortalité de l’âme élaborés par Pomponazzi. Cependant, quatorze ans plus tard, Javelli intervint à nouveau avec un traité autonome, qu’il intitula Tractatus de indeficientia (au lieu de, de immortalitate). On reconstitue ici sa trajectoire intellectuelle entre la composition des Solutiones et la publication du Tr. de indeficientia (1536) en expliquant les raisons du choix lexical inhabituel de ce dernier titre]. – II, « Aristotelian Commentaries » : Pietro B. Rossi, « Javelli’s Compendium logicae and the Dominican Exegesis of Aristotle’s Posterior Analytics in the Renaissance », p. 53-82 [Souvent réimprimé, le Compendium logicae (1540) vise, selon le propos liminaire de Javelli, à initier les néophytes et les novices à l’étude de la logique. On s’arrête ici sur la section portant sur le syllogisme démonstratif. Traditionnellement négligé, cet élément de la doctrine était habituellement omis dans la tradition des summulae logicales comme trop complexe pour être expliqué de manière suffisante dans un abrégé. Javelli se démarque en rendant un compte complet de la aristotélicienne du syllogisme démonstratif, sans toujours parvenir à un exposé succinct et non rebutant. Le Compendium est ici replacé dans la tradition dominicaine d’exégèse des Analytiques postérieurs au XVe siècle, en particulier Dominique de  Flandre, Franciscus Thomae et Jérôme Savonarole, puis analysé en profondeur. On le compare pour finir avec le commentaire de son confrère Francesco Silvestri, remarquable exemple d’érudition et de rigueur philologique. Des sections des ouvrages de Dominique de  Flandre, Thomas de Vio (Cajetan), Javelli et Silvestri sont transcrites en appendice] ; Luca Burzelli, « Chrysostomus Javelli on Causal Efficiency and Eternal Movement : Physical Issues », p. 83-104 [Le débat sur l’éternité du mouvement et l’efficience causale de Dieu sur le monde fut soulevé par Thomas d’Aquin observant dans le De aeternitate mundi que la question n’était pas susceptible de solution certaine et relevait de la foi. L’école aristotélicienne padouane du XVe siècle (Paul de Venise, Gaëtan de Thiène, Agostino Nifo, Élie del Medigo, Pietro Pomponazzi) avança une solution philosophique en énonçant que l’action de Dieu pouvait être décrite comme une « cause conservatrice » opérant sur quelque chose d’incréé et d’éternel. C’était là, théologiquement, une hérésie. Au siècle suivant, Javelli consacra quelques-unes de ses Quaestiones super Physicam à ce problème, notant que les commentateurs récents avaient mieux aimé « glorifier les arguments du Philosophe » (que défendre la théologie de Thomas et la vérité chrétienne. On examine ici ses propres solutions, dans le contexte d’une opposition à d’autres maîtres d’orientation scotiste ou averroïste] ; Michael Engel, « Hervaeus Natalis and Chrysostomus Javelli on Averroes’ Account of Creation. A Thomist Controversy Concerning Metaphysics », p. 105-119 [Traitement de la création par Javelli dans ses Quaestiones super Metaphysicam : il promeut une lecture de la notion de creatio ex nihilo qu’il croit en thomiste fidèle s’appliquer à la création des âmes humaines aussi bien qu’à celle du monde dans sa globalité et selon laquelle l’acte divin de création se manifeste dans le temps mais ne requiert pas de matière préexistante (creatio ex nihilo cum novitate essendi). La formule est atteinte de manière dialectique, Javelli se livrant chemin faisant à la mention et à la critique d’autres thomistes. Ayant analysé sa doctrine, en signale des aspects curieux et propose une hypothèse de contextualisation avec le reste de la construction théologique de Javelli] ; Leonardo Graciotti, « Reading Aristotle’s De sensu et sensato. Chrysostomus Javelli’s Discussion of Extramission and Intromission Theories of Vision », p. 121-141 [La place des commentaires sur le De sensu et sensato dans l’ensemble de l’exégèse javellienne de l’encyclopédie aristotélicienne. Javelli a traité deux fois du De sensu : dans l’épitomé publié à Venise en 1531, puis en vingt et une questions publiées pour la première fois après sa mort, en 1577, toujours à Venise. Il n’est pas possible de dater la composition de ces deux œuvres mais l’auteur établit la relation étroite des épitomés et des questions à partir de données paratextuelles et intertextuelles. Il montre ensuite, sur l’exemple d’une des questions (sur l’intromission et l’extramission des species visuelles), que Javelli était un auteur changeant, capable de recourir à des sources très différentes et de les harmoniser afin de rendre le texte d’Aristote compréhensible à ses élèves et son souci pédagogique domine dans ses écrits exégétiques] ; Claus A. Andersen, « Javelli and the Reception of the Scotist System of Distinctions in Renaissance Thomism », p. 143-167 [Fait connaître un aspect délaissé des relations entre les deux principales écoles de la Renaissance, thomiste et scotiste, à savoir l’influence de la littérature scotiste relative aux distinctions chez quelques thomistes du XVIe siècle. Il est principalement question de l’usage fait par Javelli, dans son traitement des attributs divins, de cette doctrine scotiste des distinctions, mais aussi de son recours à des sources thomistes. On reconstitue les débuts de la littérature scotiste des distinctions jusqu’au début du XIVe siècle en montrant comment certains des premiers disciples de Duns Scot, notamment François de Meyronnes et Petrus Thomae, ont systématisé son ontologie des degrés de l’être en produisant des listes de distinctions subtiles à appliquer à divers niveaux de la réalité. On donne les grandes lignes de la réception ultérieure de ces modèles de distinctions dans l’école scotiste avec une attention particulière pour Étienne Brulefer dont le résumé du modèle à sept distinctions de Petrus Thomae fut la source de Javelli regardant la doctrine scotiste. On considère ensuite comment Javelli utilisa ce résumé et voulut intégrer la doctrine scotiste dans son traitement des attributs divins. Traditionnellement, les thomistes n’admettaient qu’une sorte de distinction rationnelle ou mentale entre les attributs et entre eux et l’essence divine, mais Javelli s’efforce de montrer que la position thomiste pourrait être réconciliée avec la doctrine scotiste de la distinction formellle ou ex natura rei. Cependant il n’adopte pas toujours cette approche conciliatrice et l’auteur forme l’hypothèse que son point de vue a changé. L’auteur montre pour finir la réaction d’autres thomistes de la Renaissance au système scotiste des distinctions, en particulier Andreas Bodenstein von Karlstadt, Bartolomeo Manzoli et Mattia Gibboni da Aquario, auteurs de traités sur la théorie thomiste de la distinction modelés sur le système scotiste. Pour le remplacer, certains d’entre eux compilèrent des listes de distinctions conformées à la métaphysique thomiste. Javelli est jugé plus conciliant et recoupant le concordisme de Pic de la Mirandole, tenant d’un accord fondamental sur la distinction des attributs]. – III, « Platonic Commentaries » : Maude Vanhaelen, « Chrysostomus Javelli’s Commentaries on Plato’s Moral Philosophy », p. 171-194 [Bien que souvent considéré comme un thomiste en raison de son rôle dans l’affaire Pomponazzi, Javelli est avant tout l’auteur de commentaires monumentaux sur la philosophie morale et politique d’Aristote, de Platon et des Écritures, largement négligés par la recherche moderne. On en signale ici l’importance en portant une attention particulière sur ses épitomés des ouvrages d’éthique et de politique de Platon, achevés en 1535 et imprimés à Venise en 1536 par Aurelio Pinzi. Ces deux commentaires sont l’une des premières tentatives pour transformer les dialogues « asystématiques » de Platon en un système comparable dès lors à celui d’Aristote et applicable à l’interprétation des idées morales et politiques de l’Écriture. Ce faisant, Javelli se sépare délibérément de la tradition néoplatonicienne et mystique ravivée au siècle précédent par Marsile Ficin et fournit l’un des premières interprétations de « Platon par lui-même », à la manière des interprétations philologiques du XVIe siècle d’ « Aristote par lui-même ». L’étude considère pour finir les commentaires platoniciens de Javelli en tant que partie d’un triptyque visant à montrer que la philosophie morale de Platon est à préférer à celle d’Aristote mais n’est qu’une étape vers une vraie philosophie morale chrétienne fondée sur la seule Écriture] ; Eva Del Soldato, « Using Ficino: Chrysostomus Javelli on Love and amor sui », p. 195-208 [Le traité de Javelli sur l’amor sui dans son Epitome in Ethicen, hoc est, moralem Platonis philosophiam (1536) fournit un exemple pour commenter la façon dont il retravaille une source telle que les commentaires platoniciens de Marsile Ficin. Amor sui est un concept à la fois philosophique et théologique qui sert de point de départ à un traitement général de l’amour. Javelli, tout en s’appuyant sur le commentaire de Ficin sur le Banquet, le réélabore par sélection et par manipulation du sens, en vue de prouver que la philosophie de Platon était une docta religio]. – IV, « Christian Philosophy » : Tommaso De Robertis, « Neither Plato Nor Aristotle. Javelli’s Project of Christian Philosophy », p. 211-230 [Le concept javellien de philosophia Christiana, projet négligé par les chercheurs modernes. Javelli peut être mise au petit nombre des penseurs de la Renaissance qui voulurent construire le projet systématique et cohérent d’une philosophie chrétienne, incluant les trois branches de la philosophie pratique, éthique, économie et politique et développé dans trois traités, Philosophia moralis Christiana, Oeconomica Christiana, Philosophia civilis sive politica Christiana, publiées ensemble à Venise en 1540. In this chapter, On s’attache ici à l’étape préliminaire de ce projet, le démantèlement de l’éthique classique incarnée surtout en Platon et Aristote par insertion dans le traitement des ouvrages afférents de ces deux auteurs portant réfutation systématique des principales positions de l’éthique classique, et concluant que le platonisme et l’aristotélisme sont également inutiles au développement d’une philosophie vraiment chrétienne. Sa réfutation philosophique de l’éthique classique fait écho à des arguments et motifs érasmiens et à des propositions tirées de comparationes du XVe et du XVIe siècle entre les philosophies de Platon et d’Aristote] ; Tomáš Machula, « Javelli’s Christian Philosophy of Virtue », p. 231-244 [L’un des traits caractéristiques des traités thomistes d’éthique de la Renaissance et du début des Temps Modernes est la présence à la fois des vertus in général (définition et objet de la vertu, rôle de la prudence assurant leur connexion, etc., conformément au traité thomasien des vertus dans la Somme de théologie, Ia IIae), et des vertus particulières (vertus partielles ou subordonnées, péchés contre des vertus particulières, etc., ce qui correspond à une partie notable de la ST, IIa IIae). Javelli ne traite pas des vertus cardinales en commentant saint Thomas mais dans sa Philosophia moralis Christiana, en continuité avec les vertus théologales. La première approche manque ou est réduite à peu de chose dans le mince premier traité de la Philosophia moralis Christiana dont la plus grande partie utilise la deuxième approche, séquentielle, commentant les vertus particulières. L’œuvre est un traité ou compendium (épitomé) indépendant dans lequel, outre Aristote, Javelli cite des auteurs platoniciens. Il défend avant tout un traitement chrétien du sujet et illustre ou démontre nombre de ses thèses à l’aide de textes bibliques. Au total, sa Philosophia moralis Christiana offre un traitement séquentiel de vertus particulières plutôt qu’une tentative pour les saisir synthétiquement en tant que complexe cohérent] ; Rita Ramberti, « Javelli on Predestination », p. 245-259 [Étude de la Quaestio de Dei praedestinatione de Javelli (parue en 1577). L’étude compte trois parties : la première de présentation historique de la Quaestio, faisant remonter la controverse à l’édition par Luther de l’Épître aux Romains en 1534 ; la deuxième porte sur les ch. 1 à 4 de la Quaestio de Javelli dans lesquels il résume et rejette les conceptions de la prédestination de saint Thomas, Duns Scotus, Luther et d’autres auteurs ; la troisième a pour objet la pars construens de la Quaestio (ch. 5 à 10) dans laquelle, à la différence de ses devanciers, il traite de la prédestination ex parte creaturae plutôt que du point de vue du Créateur, et rend un compte complexe des phases du processus de la prédestination. De la sorte, il représente une tentative originale de conciliation de la prescience divine, de la prédestination et du libre arbitre humain]. – Index (des noms et des notions).


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Jean-Pierre Rothschild (27 mai 2024). De Robertis (Tommaso), Burzelli (Luca) [dir.]. Quid sit homo. Consulté le 15 mars 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/11u95