Portrait du poète en tant que philosophe : sur la philosophie de Dante Alighieri, Paris, J. Vrin, 2023, 182 p. (« Bibliothèque d’histoire de la philosophie »). Notice de QSH. On peut chercher à lire Dante philosophiquement et lui-même s’est voulu philosophe. Le présent ouvrage est formé principalement de la traduction française de Porträt des Dichters als Philosoph…, Bâle, 2020, qui envisage successivement la conception dantesque de la philosophie (la philosophie morale érigée en philosophie première à la place de la métaphysique), la philosophie du langage (concréé ou non [Dante a varié sur ce point], le langage d’Adam n’est plus usité ; les langues d’usage, créées par l’homme, sont changeantes et éphémères comme lui, car « nul effet ne peut excéder sa cause » ; le langage est le propre de l’homme : les anges, dont les intellects sont mutuellement transparents en l’absence d’obstacle corporel, n’en ont pas besoin ; les animaux non plus, qui sont mus identiquement par des instincts semblables ; en revanche, chez les hommes, la raison interfère inégalement avec les instincts dans la volonté, de sorte que l’un ne peut prévoir la conduite de l’autre ; au-delà de la fonction communicationnelle, le poète développe l’idée de la joie d’être compris en un échange amical) ; des exemples de la présence de la philosophie dans la Comédie (comment celle-là structure celle-ci : en Enfer XI, la disposition des lieux est expliquée par le renvoi aux trois types d’inconduite distingués par Aristote en Éthique à Nicomaque VII, 1, 1145a16 ; en Purg. XVI-XVIII, centre de l’œuvre, est exposée la dialectique de l’amour et de la liberté) ; et « la dimension politique de la doctrine de l’intellect et le fondement de la théorie politique » (comme Aristote et saint Thomas, Dante regarde la politique comme destinée à assurer le bonheur des hommes ; il distingue comme le second d’un bonheur philosophique atteignable en ce monde une béatitude spirituelle du chrétien dans la vie éternelle mais, à la différence de lui, ne subordonne pas le premier, acquis par l’exercice des vertus cardinales, au second, qui relève des vertus théologales et de la grâce ; par suite, le pouvoir politique qui doit assurer les conditions du premier n’a pas à dépendre du pouvoir religieux qui a en vue la seconde). Suivent trois articles déjà parus en français, « La gracieuse lumière de la raison. Variations et portée de l’argumentation philosophique chez Dante » (2017 ; Dante qualifie de curiale le « vulgaire illustre » ; en l’absence de cour royale en Italie, le prince auquel l’expression fait référence n’est autre que « la gracieuse lumière de la raison » [De vulgari eloquentia I, XVIII, 5], expression qui renvoie à la fois à la puissance de connaître et d’argumenter et à sa participation de la nature divine : principes en quoi consiste cette lumière ; l’éclairage qu’ils apportent à la démarche ; la raison humaine est limitée mais le désir de savoir l’est aussi [la philosophie première est pratique] et la multitude des homme concourt à a connaissance universelle ; l’usage des syllogismes) ; « Quelques remarques sur Dante et la tradition philosophique » (2017 ; la notion de philosophie chez Dante, sa conversion philosophique, la « famille philosophique », les épicuriens, conclusion) ; et « Où est cette justice qui le condamne ? Notule sur le sort des païens chez Dante et Thomas d’Aquin » (2015). Les deux derniers articles insistent en particulier sur ce que Dante étend aux principaux philosophes païens (et l’épicurisme ne paraît guère moins noble à ses yeux que le stoïcisme et l’aristotélisme) le limbus patrum où Thomas d’Aquin assignait les justes de l’Ancien Testament : de la sorte, les païens vertueux, bien que n’ayant pas connu le Christ et n’ayant pas été baptisés, néanmoins ne sont pas damnés.
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Jean-Pierre Rothschild (27 mai 2024). Imbach (Ruedi) [monogr.]. Quid sit homo. Consulté le 15 mars 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/11u94