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Kieckhefer (Richard) [monogr.]

The Mystical Presence of Christ. The Exceptional and the Ordinary in Late Medieval Religion, Ithaca (NY), Cornell University Press, 2022, XVII-362 p., ill. en noir et blanc. (Rec. Denis Renevey, Speculum 99/2, April 2024, p. 595-596. L’auteur soutient que l’attention [des historiens] à la présence de l’humanité du Christ au moyen âge tardif a faussé la perception de sa présence transhistorique et éternelle ; il en prend pour preuve les écrits d’un « long » XIVe siècle qui illustrent le type d’expérience qu’on nomme christophanie, dans laquelle la divinité du Christ est mise en avant plus que son humanité. Il parcourt des situations exceptionnelles ou ordinaires afin d’observer comment des thèmes tels que la pénitence ou la dévotion à la passion du Christ sont le partage des chrétiens ordinaires autant que des plus pieux. Le ch. 1 traite des deux natures et en particulier de la profonde attention de livres de dévotion à succès du moyen âge tardif, ainsi les Meditationes vitae Christi du Ps.-Bonaventure, aux implications aux implications de la souffrance pour les deux natures du Christ ; or son omniprésence n’est concevable qu’à l’égard de sa divinité, tandis que l’attention extrême à son humanité paraît reléguer au second plan sa nature divine. Le ch. 2 étudie la manière dont les discours magistraux, la transtemporalité, les caractères divins de la nature humaine du Christ et le passage de la méditation à la contemplation ont déterminé les christophanies dans les textes allemands, flamands et italiens des XIIIe et XIVe siècles, avec les exemples de ma prémontrée Christina de Hane (1269-v. 1292) et le Livre de Margery Kempe (à prpos de la transtemporalité). Le ch. 3 traite de la présence du Christ selon un schéma décomposable en présupposition, intuition et perception, schéma cependant fluide dans les textes ; la perception relève de l’extraordinaire, l’intuition, au milieu, est « un sentiment indistinct de présence spirituelle » qui peut aboutir à la perception par l’intermédiaire des sens spirituels. Au ch. 4, il s’agit de la présence du Christ dans la prière et la méditation : il est des prières dogmatiques, célébratoires, pénitentielles, d’autres qui expriment le regret de n’avoir pas été témoin de la vie du Christ ; la pratique des méditations de celle-ci aurait aidé le chrétien à passer de la méditation à la vision et, par rétrospection, à revenir au temps du Christ ; les révélations de Katarina Tucher de Nuremberg, rapportées entre 1418 et 1421, invitent à passer d’une participation imaginée à une christophanie visionnaire ; la présence du Christ pouvait aussi être renforcée par des prières et interjections courtes et répétitives, chez les contemplatifs comme parmi les simples fidèles. Le ch. 5 a pour objet la présence en contexte liturgique, avec plusieurs exemples de christophanie mis par écrits dans des livres de couvents féminins allemands, le Christ apparaissant à divers moments de sa vie terrestre ou lors de sa résurrection : Dorothée de Montau faisait l’expérience de sa présence par rétrojection les jours de jeûne, par projection lorsqu’il lui indiquait comment se préparer à ou se comporter dans une occasion liturgique ; voire, éprouvait de l’anxiété à ne savoir comment en user avec lui sous l’apparence d’un enfant. Le ch. 6 montre que la personne du Christ comporte une personnalité, capable d’une variété de comportements. Le ch. 7, qu’elle assume des rôles différents selon son inculturation dans la dynamique sociale des contemplatifs : enfant, père, médecin, pèlerin, époux. Il s’agit au ch. 8 de l’intérêt du Christ pour la communauté : certaines révélations aux religieuses de Helfta ou consignées dans les livres des religieuses allemandes étaient destinées à être partagées ; d’autres demeuraient cachées ; certaines christophanies représentent des incidents de la vie de tous les jours, y compris les heurts de personnalités dans la vie commune ; elles tendent à renforcer l’éthos communautaire ou à insister sur le rôle d’interceseur joué par la communauté pour les vivants comme pour les morts. Au ch. 9, à nouveau à propos de Dorothée, M. Kieckhefer résume les diverses formes de christophany et montre que le Christ agit en maître de discipline, en époux et en instructeur, le cas de Dorothée impliquant aussi son hagiographe Johannes Marienwerder. Le ch. 10 rappelle que l’intuition et la perception d’une présence du Christ étaient examinées de près e pleine conscience des dangers de la suggestion et des tromperies démoniaques. La nature divine était plus présente qu’on ne croit au moyen âge tardif et cette étude a considéré ensemble les deux natures en montrant leur complémentairté, au-delà d’une opposition trop simple).


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Jean-Pierre Rothschild (28 avril 2024). Kieckhefer (Richard) [monogr.]. Quid sit homo. Consulté le 19 avril 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/11u8q